3 Jours avec Agar

Nous connaissons mal Agar, elle ne brille pas vraiment comme Sarah, Judith ou Esther… Et pourtant nous avons bien à apprendre d’elle. Saint Paul la présente comme la femme esclave et elle le fut, au service d’Abraham et Sara « Car il est écrit qu’Abraham eut deux fils, un de la femme esclave, et un de la femme libre. » (Galates 4,22). Allez, prenez votre Bible et partons à sa rencontre : Genèse 21, 1-21.  21 versets pour deux histoires de femme. Les 10 premiers versets nous racontent l’histoire du dénouement heureux pour un couple stérile, nous y devinons toute la joie éclatante de la paternité  et d’une maternité épanouie comblée après l’attente. Puis, comme en miroir, les 10 versets suivants nous livrent le récit d’une maternité malheureuse, d’un drame féminin, d’un désert infini de l’âme, d’une pauvre servante chassée. Le verset 10, comme une indication, nous emmène sur le chemin d’Agar : «et elle dit à Abraham : « Chasse cette servante et son fils, car le fils de cette servante n’héritera pas avec mon fils, avec Isaac. ». Je résume, Agar était esclave, elle est réduite à sa fonction, utilisée pour permettre une descendance, ensuite elle est brutalement jetée hors de la maison de ses maîtres. Ce n’est pas tout ! Dieu demande à Abraham contrarié par cette décision de Sara, d’obéir à sa femme, de chasser Agar, ce qui, avouons-le, n’est pas commun à l’époque. Il y a de quoi y perdre son bon sens, le sens de la justice… mais alors ? Dieu permettrait-il le rejet ? Alors, approchons-nous de cette sœur en Christ. Oui, en Christ, car c’est en Lui que nous lisons l’Ancienne Alliance, c’est à travers la volonté de Salut de Dieu que nous comprenons Ses projets et que nos vies sont éclairées dans leurs bons et plus mauvais évènements.

Jour 1  

Sortir de l’esclavage du rejet 

Notre sœur est donc « chassée, jetée, expulsée », c’est la force du verbe employé en hébreux. « … il lui remit aussi l’enfant, et la renvoya. Elle s’en alla, et s’égara dans le désert de Beersheba ». Ensuite Agar s’égare ! Pourtant ce désert porte en lui une promesse, il se nomme « Beersheba », c’est-à-dire, « Puits du serment ». Le mot « désert » en hébreux (midbar) signifie aussi « bouche » comme organe de la parole. Dans le désert Dieu me parle ! Quel paradoxe ! Nos blessures nous parlent d’un lieu de notre âme où l’amour a déserté un jour, et, où nous avons besoin d’une parole consolante, guérissante. Le rejet est la blessure la plus primaire puisqu’elle concerne ma vie en elle-même,  ses assauts sont d’une immense violence, une menace, un gouffre. Certaines l’ont connu consciemment au travers d’événements précis, d’autres la porte en elles comme un fantôme, sans en connaitre l’origine, tant elle peut s’enraciner dans la mémoire la plus souterraine.   S’il y a forcément un puits du Serment d’Amour de Dieu dans toute vie, je peux, avec ce rejet, comme Agar, me perdre sur le chemin et ne jamais boire au puits d’Agar, ne jamais goûter et croire à la Promesse de Vie.  Nous comprenons alors Agar, car il nous est bien difficile parfois de quitter nos esclavages, pensons à Israël qui regrettait l’Égypte. Au lieu de célébrer sa libération, Agar se perd, le terme hébreu dit davantage « elle est allée se perdre ». Nous ne pouvons négocier avec nos esclavages, ni tourner en rond indéfiniment, à un moment nous les reconnaissons et nous nous décidons pour le grand départ avec la grâce de Dieu. En un mot ma libération est une collaboration de ma volonté et du secours de Dieu.

Temps de réflexion

-Il y a-t-il des domaines de rejets dans ma vie ? Et quelles sont mes habitudes en de tel cas ?

-Comment pourrais-je me tourner vers Dieu la prochaine fois ? Établir une petite stratégie pour courir dans les bras du Père sans attendre.

-Quels sont les liens que je ne parviens pas à laisser …. tout en sachant cependant qu’ils m’emprisonnent ?

Temps de prière

Seigneur Tu nous as libérées de tous les esclaves, nous sommes tes filles ! Tu sais combien la force de ce lien filial a parfois été ébranlée par les circonstances de notre vie, les relations et évènements. Pourtant Tu nous as tout donné. Aide-moi à davantage célébrer ton immense Amour, plutôt que le désarroi de ma blessure, à croire davantage à tes Paroles de Vérité qu’aux mensonges de mes plaies, à lever les yeux vers Toi. Guéris-moi, libère-moi, restaure-moi, afin qu’à mon tour je devienne une terre d’accueil pour les rejetés de la vie.

Jour 2

Un chemin de compassion

L’esclavage du péché nous fait tourner comme un petit hamster dans sa roue. Humainement, face aux circonstances de nos vies, soit nous accusons, soit nous nous justifions, soit nous nous victimisons. Mais chacun de ces plis garde prisonnière d’une frustration pour notre âme, faite pour l’Amour. Jésus nous a libérées de ces liens, IL nous montre son Cœur doux et humble, nous amène dans l’extrême Miséricorde du Père où nous  sommes à l’abri et nous promet le Saint Esprit pour nous guider sur ce chemin.  Agar est chassée avec son fils Ismaël. Désorientée, fatiguée sur ce nouveau chemin de vie : « 15 Quand l’eau de l’outre fut épuisée, elle laissa l’enfant sous un buisson, 16 et alla s’asseoir non loin de là, à la distance d’une portée de flèche. Elle se disait : « Je ne veux pas voir mourir l’enfant ! » Elle s’assit non loin de là. Elle éleva la voix et pleura. ». Le terme hébreu dit « elle jeta l’enfant », cela nous rappelle la façon dont elle-même Agar avait été expulsée, chassée. Bien souvent nos comportements expriment la façon dont un autre s’est comporté avec nous. Nous connaissons la règle d’or : « Toutes les choses donc que vous voulez que les hommes vous fassent, faites-les-leur, vous aussi, de même ; car c’est là la loi et les prophètes. » (Matthieu 7:12) » Nous avons acquis une façon d’être à soi, aux autres, Jésus remet au centre la recherche du bien.  Nous aurions désiré qu’Agar accompagne son fils souffrant, qu’elle pleure sur lui, le porte… Mais Agar se retourne sur elle jusqu’à se protéger en mettant la souffrance de son propre fils à distance. Celle qui a trop souffert finit par se protéger, la charité se refroidit quand trop c’est trop. En fait, elle se met au centre et se dérobe à sa responsabilité car elle avait la charge d’autrui, ici son enfant. Ainsi l’abbé Pierre enfant se plaignant d’une frustration à son père, et cette réponse qui entraina toute sa vie « Et les autres Pierre ? »  Ainsi va le mouvement de la victimisation lorsque nous nous mettons au centre. La maternité d’Agar est affaiblie et son attitude semble lui faire oublier que Dieu n’abandonne jamais, jamais, jamais. Cependant, pour s’ouvrir au secours de Dieu et l’accueillir, le voire même, faut-il trouver la bonne place intérieurement, cette sortie de soi vers l’autre, vers Dieu. Avec Agar, nous désirons passer de la victimisation à la compassion et devenir un bon samaritain de nos frères.

Temps de réflexion

-Quelles sont mes réactions lorsque je suis déçue, rejetée ?

-Quelles sont mes points de frustrations ? Les nommer et demander à l’Esprit Saint de visiter ces lieux

-Je sais que Dieu n’abandonne jamais, trouver mes points d’incrédulité, de doutes… et prier.

Prière

Seigneur, merci pour ta main qui jamais ne me quitte. Tu connais ma fragilité, ma capacité à me retourner sur moi, à me replier sur mes propres intérêts avant ceux de mes frères, élargis mon cœur, guéris-moi de la victimisation, de l’égoïsme, du narcissisme et conduis-moi dans Ton Cœur doux et humble qui donne gratuitement et sans compter.

Jour 3

Boire au puits d’Agar

Nous nous souvenons qu’Agar est chassée dans le désert « Puits du serment », qu’est-ce qu’un serment ? Une promesse, une alliance, une parole prononcée. Nous, pauvres humains pouvons faire des serments et les trahir, mais Dieu est fidèle et comme dit la Parole : ne se repent jamais de ses dons. Comme disait un ami consacré, dans cette alliance, au moins je sais qu’un des deux sera fidèle ! Toutes ces attitudes que nous avons vues ces deux jours nous séparent de Dieu, elles nous empêchent de voir l’immensité de la Bonté de Dieu, et entretiennent une sorte de cécité spirituelle. Dieu pourvoit au faible, à celui qui crie d’un cœur sincère et dépouillé de lui-même : « 17 Dieu entendit la voix du petit garçon ; et du ciel, l’ange de Dieu appela Agar : « Qu’as-tu, Agar ? Sois sans crainte, car Dieu a entendu la voix du petit garçon, sous le buisson où il était ». Magnifique, alors qu’Agar s’éloigne, Dieu entend l’enfant ! Dieu entend toujours le plus fragile, le plus délaissé, abandonné, sa logique est bien loin de ce monde. Quelle leçon pour elle ! Et pour nous ! Il semble lui dire « Sors de toi Agar, qu’as-tu à te replier sur ta souffrance ? » mais encore : « 18 Debout ! Prends le garçon et tiens-le par la main, car je ferai de lui une grande nation. 19 Alors, Dieu ouvrit les yeux d’Agar, et elle aperçut un puits. Elle alla remplir l’outre et fit boire le garçon ». Dieu, remet les rôles en ordre, Il restaure Agar dans sa dignité de mère, Il la fait ainsi grandir. Mais le plus extraordinaire est que Dieu lui ouvre les yeux afin qu’elle puisse enfin voir que Dieu n’abandonne jamais, qu’elle puisse enfin voir le serment de Dieu : le puits d’Agar ! Pourtant ses yeux étaient ouverts, mais pas ceux de son âme. Quel chemin pour passer de moi à Lui ! Avant de lui ouvrir les yeux, Dieu lui livre la Promesse « Je ferai de lui une grande nation ». Christ est notre Promesse éternelle, allons boire à la fontaine, allons au puits d’Agar ! Cette visitation est au cœur de notre âme, ce puits est en notre baptême. Notre vie spirituelle ressemble alors davantage à une descente en nous à la rencontre de Sa présence, une sorte de « descension » traversant tous les déserts, les sècheresses jusqu’à la source qui jamais ne tarira. Belle route !

Temps de réflexion

-Puis-je mettre des mots et une prière sur mes replis sur moi ?

-Qu’est ce qui a besoin de grandir en moi, dans mon identité de fille, d’épouse ou de mère (plan temporel et spirituel) ?

-Puis-je nommer mes doutes sur l’inconditionnelle Présence de Dieu à mes côtés ?

Prière

Seigneur, tu sais combien il m’est difficile d’enjamber les frontières de mon égo, viens, ouvre mes yeux ! Que je vois ! Pardon pour mes doutes, mes soupçons, ma crainte. Christ Tu m’as libérée, je suis fille de Dieu mais je continue parfois à me conduire comme une fille de ce monde, fais-moi grandir, je veux Seigneur, boire au puits d’Agar et croire sans faille à Ta Promesse :  Tu m’as faite pour le bonheur !